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Réponse à ma question au gouvernement : « Qui sont les créanciers de la France ? » - 10 novembre 2010

Question N° : 80274  de Mme Laure de La Raudière
Ministère interrogé : Budget, comptes publics et réforme de l'État

Texte de la question

Mme Laure de La Raudière attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État sur le rôle de l'agence France Trésor sur la gestion de la dette et de la trésorerie de l'État, au regard notamment de l'impératif de transparence qui s'impose à ce service de compétence nationale. En effet, la France devra émettre 175 milliards d'euros d'emprunts en 2010, et les contribuables sont légitimement en droit de savoir clairement qui sont les créanciers de l'État. Selon le directeur général de l'agence France-Trésor, "les acheteurs asiatiques sont des acheteurs nets chaque mois, ainsi que ceux du Moyen-Orient et du Maghreb". Force est de reconnaître qu'une telle information est pour le moins lacunaire. Certes, on sait qu'à la fin de l'année 2009, 67,9 % de la dette négociable de l'État (OAT, BTAN, BTF) était détenue par des non-résidents. Par conséquent, elle lui demande de lui indiquer, année par année depuis 2000, qui sont les créanciers de la France, pour quels montants et à quels taux.

Texte de la réponse

Les textes actuellement en vigueur (notamment art. L. 228-2 du code de commerce, décret d'application n° 2002-803 du 3 mai 2002 publié au Journal officiel du 5 mai 2002, art. L. 212-4 du code monétaire et financier relatif à la nominativité obligatoire) n'autorisent les conservateurs d'instruments financiers (Euroclear France pour les titres d'État français) à communiquer aux émetteurs la liste de leurs détenteurs finaux qu'aux seuls émetteurs d'actions, de bons de souscription d'actions ou d'instruments de taux donnant immédiatement ou à terme accès au capital. Par conséquent, l'agence France Trésor (AFT) ne peut pas identifier précisément les détenteurs des obligations assimilables du Trésor (OAT), des bons du Trésor à intérêts annuels (BTAN) et des bons du trésor à taux fixe (BTF). Néanmoins, la structure de la détention de la dette française peut être estimée grâce à deux sources d'information : les statistiques de la balance des paiements fournies par la Banque de France qui portent sur la détention de la dette de l'État par les non-résidents. Ces statistiques ne donnent toutefois pas d'indication quant au détail de la répartition géographique à l'intérieur de la catégorie « non-résidents » ; l'étude annuelle publiée par le Fonds monétaire international (FMI) (coordinated portfolio investment survey) qui fournit davantage de détails sur la répartition de détention par pays mais qui porte sur un périmètre qui est plus large que celui des seules dettes gouvernementales (dette publique et dettes bancaires). La direction de la balance des paiements de la Banque de France fournit les données concernant la détention de la dette française par les non-résidents. Ainsi, selon l'enquête réalisée chaque trimestre sur « les placements en valeurs mobilières des agents économiques » 70,6 % de la dette négociable était détenue par les non-résidents, au mois de juin 2010 (84,1 % des BTF, 89,8 % des BTAN et 61,7 % OAT). (En pourcentage.)



BTF
BTAN OAT
TOTAL
dette
négociable
31 juin 2010 84,1 89,8 61,7 70,6
31 décembre 2009 75,3 87,4 60,2 67,9
31 décembre 2008 68,2 85,8 58,6 65,1
31 décembre 2007 63,4 75,7 56,5 61,3
31 décembre 2006 68,7 71,1 54,2 59,0
31 décembre 2005 71,5 72,7 49,7 56,5
31 décembre 2004 64,4 71,8 45,1 52,7
31 décembre 2003 56,7 69,9 39,7 48,0
31 décembre 2002 51,9 63,1 34,2 41,9
31 décembre 2001 61,1 55,2 30,2 38,4
31 décembre 2000 63,0 50,7 25,2 33,7
31 décembre 1999 71,5 46,9 17,7 28,0
31 décembre 1998 48,1 36,8 15,0 22,6
31 décembre 1997 51,9 30,3 12,4 20,0
31 décembre 1996 43,6 34,6 9,6 18,4
31 décembre 1995 42,5 40,7 16,0 24,8
31 décembre 1994 10,3 25,5 19,9 20,5
31 décembre 1993 19,6 38,4 32,3 32,8
Le sondage coordinated portfolio investment survey mené par le FMI donne une indication partielle sur la part des résidents situés dans la zone euro dans les investissements de portefeuille dans les titres de dette (dette publique et dette bancaire n'étant pas distinguées). Selon ce sondage, à la fin de l'année 2008 il apparaît que 47,4 % des titres de dettes détenus par les non-résidents le sont par des non-résidents situés à l'intérieur de la zone euro. Sous l'hypothèse que la structure de la détention de l'ensemble de la dette extérieure de la France est identique à la structure de la détention de la dette de l'État et que cette structure de détention n'a pas évolué entre 2008 (date de référence de la dernière étude publiée par le FMI) et 2010, il est possible d'estimer la proportion de la dette de l'État qui est détenue par des non ésidents situés à l'intérieur de la zone euro, soit environ un tiers (70,6 % multiplié par 47,4 %). Toujours selon ce sondage, la part des investissements de portefeuille provenant de l'extérieur de la zone euro dans les investissements de portefeuille dans les titres de dette serait plus importante en Allemagne (58,3 %) qu'en France (52,6 %) ou aux Pays-Bas (43,5 %) ; l'Italie (33 %) et l'Espagne (32,3 %) présentant une proportion d'investisseurs non-résidents inférieure. Un niveau de détention élevé de la dette française par des non-résidents ne doit pas être considéré comme un handicap pour l'économie française : outre le signal de confiance dont il témoigne de la part de la communauté des investisseurs sur la qualité du crédit de la France et sur l'économie française, elle accroît la sécurité de la gestion de la dette. En effet, plus la dette est détenue de manière diversifiée du point de vue géographique et par type de détenteur, moins la réponse aux chocs affectant la demande de titre est uniforme. La diversification géographique des investisseurs permet également de diminuer le coût de la charge de la dette en augmentant la concurrence potentielle pour l'achat des titres de dette française. Au sein des investisseurs internationaux, l'exploitation de la demande internationale, qui émane notamment des banques centrales, constitue une chance pour les émetteurs qui en bénéficient car, s'agissant d'une demande structurelle, elle est assez peu sensible au taux d'intérêt à la différence de celle émanant par exemple des assureurs. En outre, de nombreux investisseurs non-résidents, comme les banques centrales ont un mode de gestion de leurs actifs assez proche de la stratégie « de détention jusqu'à l'échéance », ce qui en fait des investisseurs de long terme qui stabilisent le marché en absorbant par leurs achats récurrents l'essentiel des émissions nettes. Enfin, une plus grande sollicitation de l'épargne nationale pour le placement de la dette de l'État engendrerait de manière certaine un effet d'éviction important au détriment de l'investissement privé qui bénéficie actuellement des placements monétaires et obligataires (livrets réglementés, assurance vie...). Le bénéfice associé à un niveau élevé de diversification des détenteurs de la dette française, que ce soit du point de vue géographique ou par catégorie d'investisseurs, sous la forme d'un faible coût d'emprunt pour l'État - pour le plus grand bénéfice du contribuable français - nécessite la poursuite des politiques de responsabilité budgétaire et financière qui permettent à la France de bénéficier de la qualité de crédit qui est aujourd'hui la sienne. Enfin, pour mémoire, le programme d'emprunt à moyen long terme de la France pour l'année 2010 s'élève à 188 Md.

15 Commentaires

Loïc
22/11/2011 08:51

Il me semble tout à fait inconcevable que les détenteurs d'une dette, tous les Français en occurrence, soient laissés dans l'ignorance de l'identité de leurs créanciers.
comment peut-on dans ces conditions juger de l'honnêteté de ces créanciers, pourquoi ne pas penser que la crise actuelle pourrait être orchestrée par des personnes mal intentionnées dans un but inavouable tel que "casser" la zone euro ou redorer la parité dollars/euro, ou pire encore....

maxime
11/11/2011 18:09

Comment peut-on demander aux franais de payer des créanciers sans leur en donner ni le nom, ni le montant dù ?Ne serait-il pas normal que sur le net , l'ETAT monte un site avec l'état au jour le jour des dettes , des créanciers et des montants ?
Le contribuable lamda doit présenter une facture légale pour obtenir un quelconque paiement à une prestqation!
Pourquoi l'état ne le fait-il pas ?

Alex
08/11/2011 20:19

Ce n'est guère étonnant mais il suffirait d'abroger la loi de 73 qui oblige l'état à se financer auprès des marchés privés (avec les conséquences que l'on sait à savoir 1500 milliards d'intérêts à payer à ses fameux créanciers inconnus sur 1700 milliards de dette de la France !).

Pour pouvoir abroger légalement cette loi qui est inscrit désormais dans les traités européens il est indispensable de sortir de l'UE.

cricri
01/11/2011 13:01

Les français devraient pouvoir être informés de l'identité des créanciers "non résidents". l'agence France-Trésor devrait en être informé et le texte sur la non -divulgation revu.
Ainsi, les pays européens sachant quels sont les investisseurs étrangers pourraient décider d'un commun accord d'annuler un certain montant de leur dette auprès de certains investisseurs... Pourquoi pas ? Ce pourrait être un moyen de pression auprès de pays non respectueux des droits d e l'homme, par exemple : si vous ne faites pas çà, pas de remboursement ...Est-ce utopique ?

zouzou2000
30/10/2011 21:40

puisque l'on ne connaît pas les détenteurs de la dette comment peut-on savoir qu'ils ont des craintes sur le niveau d'endettement de la France et qu'ils réclament plus de rigueur

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