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Le droit d’accès à internet constitue aujourd’hui un droit fondamental . - 29 septembre 2015

En cette époque où l'on fait trop peu de cas des droits et des libertés sur Internet, je voulais partager avec vous ce texte, paru le lundi 28/9 et cosigné par le Président de l’Assemblée Nationale et la présidente de la chambre des députés Italienne.

 

La liberté sur internet est un combat que je mène depuis des années je me réjouis donc de trouver ici des raisons d'espérer !

 

La commission de réflexion et de propositions sur le droit et les libertés à l’âge numérique de l’assemblée nationale française, (dont je suis membre),  et la commission sur les droits et devoirs sur internet de la chambre des députés italienne déclarent conjointement ce qui suit:


Internet est devenu une technologie indispensable au développement économique, social et culturel de nos sociétés démocratiques. Il doit à ce titre être considéré comme un bien commun qui ne peut faire l’objet d’une appropriation au profit de quelques acteurs privés ou publics et doit rester au service des personnes. Nos deux commissions estiment donc qu’il convient d’affirmer, à l’échelle internationale, la conception d’internet comme bien commun mondial.

Nos commissions rappellent que les libertés et droits fondamentaux reconnus à toute personne par les textes internationaux, en particulier la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, les Constitutions et les lois sont garantis également sur internet.

Les commissions estiment que le droit d’accès à internet constitue aujourd’hui un droit fondamental qui facilite l’exercice d’autres droits fondamentaux, en particulier la liberté d’expression, le droit à informer et à être informé, la liberté d’entreprendre et d’innover, la liberté d’association.

 

Elles souhaitent que soit expressément consacré, au plus haut niveau dans la législation, le principe de neutralité d’internet qui constitue le préalable indispensable à l’exercice effectif des libertés à l’âge numérique.

Dans les prochaines années, dans le contexte de l’explosion de l’usage des données à caractère personnel, l’Union européenne et les législateurs nationaux devront renforcer la protection des droits fondamentaux face à l’utilisation de ces données à des fins industrielles et commerciales et la maîtrise par les individus de leurs informations personnelles. Les commissions souhaitent la reconnaissance d’un droit à l’autodétermination informationnelle permettant à chaque individu de décider de la communication de ses données et de garder la maîtrise de leur utilisation, afin de s’épanouir librement dans l’univers numérique.

Les données personnelles doivent être protégées pour garantir le respect de la dignité de chacun et de sa vie privée. Elles doivent être traitées en respectant les principes de nécessité, de finalité, de pertinence et de proportionnalité. Elles ne peuvent être collectées et traitées qu’avec le consentement éclairé de la personne concernée.

 

Nos commissions affirment partager plusieurs principes : le droit pour toute personne d’accéder à ses données à caractère personnel pour demander qu’elles soient rectifiées et effacées, le droit pour toute personne de connaître les finalités et modalités de traitement des données qui la concernent ainsi que le droit de ne fournir que les données strictement nécessaires à l’accomplissement d’obligations prévues par la loi ou à la fourniture de biens et de services sur internet.

Nos commissions déclarent qu’aucune mesure judiciaire ou administrative, aucun acte ou décision produisant des effets significatifs à l’égard d’une personne ne peut être exclusivement fondé sur un traitement automatisé des données à caractère personnel visant à définir le profil ou la personnalité de la personne concernée.

 

L’utilisation d’algorithmes et de techniques probabilistes doit être portée à la connaissance des personnes concernées qui, dans tous les cas, doivent pourvoir s’opposer à la construction et à la diffusion de profils les concernant. Une attention particulière doit être accordée aux risques liés aux procédés de personnalisation, notamment les risques de discrimination, de manipulation et d’atteinte au principe de diversité des cultures et des opinions.

Nos commissions considèrent qu’il est nécessaire de concilier les exigences de la sécurité nationale et de la préservation de l’ordre public avec la protection des droits et des libertés des citoyens. Elles réaffirment que tout traitement de données susceptible de concerner tout citoyen indifféremment aux fins de détecter des menaces ou suspicions est abusif et doit être sanctionné. Toute rétention de données ou métadonnées doit être strictement limitée en nature, quantité, durée de conservation et conditions d'accès, de façon à respecter les droits fondamentaux et les libertés.

 

Nos commissions estiment que le droit à l’effacement reconnu par la jurisprudence européenne doit être réaffirmé et dûment précisé, afin que le droit à l’information et la liberté d’expression soient également préservés.

 

Nos commissions réaffirment que le secret des correspondances s'applique également aux communications sur internet et reconnaissent la possibilité de publier des contenus sur internet en usant d’un pseudonyme ou en intervenant sous forme anonyme pour exercer les libertés civiles et politiques sans subir des discriminations ou des censures. La liberté de développer et utiliser des technologies d'anonymisation et de chiffrement est une condition concrète d'exercice de ces droits. Le secret des communications et l'anonymat ne peuvent être levés que sur décision judiciaire motivée et contestable devant un tribunal statuant en public selon une procédure contradictoire équitable.

 

Nos deux commissions appellent un renforcement des droits et des garanties des personnes à l’égard des plateformes, en particulier le droit de recevoir des informations claires et simplifiées sur leur fonctionnement. Les plateformes doivent également favoriser, dans le respect du principe de concurrence et d’innovation, les conditions d’une interopérabilité adéquate de leurs principales technologies, fonctions et données avec d’autres plateformes. Nos commissions rappellent que les règles du pluralisme et de la concurrence s’appliquent également à l’univers numérique en prévenant les risques de concentration et en sanctionnant les abus de position dominante auxquels peuvent se livrer certains acteurs, notamment par l’usage d’algorithmes pour la création de classements.

 

Nos deux commissions considèrent que toute partie publique ou privée amenée à collecter ou à traiter des données personnelles ou à effectuer des traitements qui peuvent concerner la vie privée des personnes doit être dans l’obligation de rendre des comptes, c’est à dire de démontrer son respect des droits individuels, doit pouvoir être auditée par un tiers indépendant et sanctionnée en cas de non-respect.

 

Enfin, nos commissions réaffirment le caractère indispensable de l’éducation au numérique en tant qu’un élément essentiel pour garantir le caractère effectif du droit d’accès et de la protection des libertés individuelles des personnes et déclarent que toute personne a le droit d’acquérir les capacités nécessaires pour utiliser internet de manière responsable et avertie.


Les commissions demandent qu’une reconnaissance juridique soit attribuée aux biens communs de la culture et de la connaissance, tels que la version numérique d’ouvrages dans le domaine public ou les choses non appropriables comme les idées et les faits.

 


_______________________________

CLAUDE BARTOLONE
PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE
NATIONALE

 

_____________________________________

LAURA BOLDRINI
PRESIDENTE DELLA CAMERA
DEI DEPUTATI

 


PARIS, LE 28 SEPTEMBRE 2015

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