Transférer les pouvoirs d'Hadopi au CSA : une mascarade intellectuelle. Lire ma tribune publiée dans "Le Nouvel Observateur/Le plus". - 24 juillet 2013
Cette semaine, nous examinons un texte dont se contrefichent les français, un de plus : le projet de loi audiovisuel visant à ce que la nomination des présidents de chaînes publiques soit effectuée par le CSA. Il est – encore une fois – un acte de politique politicienne "anti-Sarkozy" de François Hollande.
Je ne prendrais pas la peine de l’évoquer ici, si, en marge de ce texte, le spectre des nouveaux pouvoirs de contrôle de l’internet et de son contenu par le CSA, risquait de refaire surface. Il est donc bien naturel d’essayer de décrypter aujourd’hui, ce que tente de faire le gouvernement.
On veut conserver le pire d'Hadopi
Le rapport Lescure que l’on nous a tant vendu comme un geste fondateur d’une politique culturelle rénovée et adaptée à l’ère numérique va t’il se limiter à cacher la poussière Hadopi sous le tapis du CSA ? Après une excellente analyse de la situation, Pierre Lescure échoue à faire des propositions concrètes novatrices, adaptées aux enjeux culturels – et numériques – du 21e siècle. Acte II de l’exception culturelle ? Que nenni !
Ma position sur la loi Hadopi est ancienne et connue, loin de moi l’idée de la défendre. Mais, notons ensemble que si le gouvernement persiste dans la proposition phare du rapport Lescure, il conservera finalement le pire d’Hadopi, la riposte graduée, même débarrassée de sa peine symbolique de la coupure d’accès. En parfaite contradiction avec ses positions de l’époque. Le volet répressif de la loi Hadopi, honni hier, est adulé aujourd’hui. Belle constance de convictions ! Une fois de plus, à mon profond regret, le pouvoir politique montre sa méconnaissance de l’internet et de ses usages.
Le CSA est déjà suffisamment occupé comme ça
Mais, le plus grave, c’est le risque de voir naître une régulation franco-française et technocratique de l’internet : je me battrai bec et ongles, contre le projet de faire du CSA – dans sa version et fonctionnement actuels – le futur régulateur de l’internet en France. Il s’agit là d’une question majeure qui relève pleinement de la responsabilité des parlementaires et va bien au-delà des seuls aspects culturels. Ce débat doit avoir lieu, et ne peut être escamoté, tel que je le pressens.
Nous devons avoir le courage de stopper cette inflation législative sur des tentatives de contrôle de l’internet, qui ne produit que des résultats destructeurs pour l’économie numérique et dénués de toute vision d’avenir.
Nous devons avoir le courage de remettre en question l’élargissement permanent des compétences de ces autorités indépendantes qui y gagnent, par-là même, leur survie. Le CSA a suffisamment de travail avec ses actuelles compétences sur l’audiovisuel, qu’il propose donc au gouvernement et au parlement de simplifier l’encadrement réglementaire de sa clientèle traditionnelle pour que celle-ci puisse affronter les nouveaux enjeux numériques au lieu de caresser l’illusion dangereuse d’une régulation étatique de l’internet !
Un danger pour la création en 2013
Nous devons avoir le courage d’inventer. Internet nous y oblige. Ce n’est certainement pas en mettant la liberté de l’internet sous le joug du carcan de la réglementation audiovisuelle qu’on y parviendra !
On comprend bien que le gouvernement tente de dissimuler ses contradictions sur la question Hadopi et qu’il veuille nous faire croire que son absorption par le CSA soit une révolution moderne majeure. Il n’en est évidemment rien et la torpeur estivale qui s’installe ne doit pas nous conduire à baisser la garde. Transférer la Hadopi au CSA n’est pas l’acte II de l’exception culturelle, c’est une escroquerie intellectuelle, dangereuse pour la création à l’heure d’internet.
Lire aussi ICI l'article de PC Impact
... et de Numérama
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