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Le rapport de la mission sur la simplification législative que j'ai présidée est adopté à l'unanimité. - 13 octobre 2014

Au mois de Novembre dernier, Claude Bartolone, président de l'assemblée nationale, a décidé de créer une mission d’information en vue de la simplification de la procédure législative dont il m'a confié la présidence.

 

Nous venons de rendre nos conclusions qui ont été adoptées à l'unanimité par les députés membres de la mission.

 

 

J'ai effectué ce travail avec Régis Juanico, député de la Loire, et rapporteur de la misison, dont on trouvera ci-dessous le discours  prononcé au cours de la conférence de presse qui s'est déroulée hier l'Assemblée nationale.

Son propos résume parfaitement les 15 propositions que nous avons retenues et dont on trouvera le détail dans le compte rendu intégral ICI.

 

En bref :

Ces propositions visent à enrichir l’étude d’impact jointe par le gouvernement à tout projet de loi. Nous  proposons donc que chaque étude d’impact ait l’obligation de préciser les charges administratives créées par le texte proposé. Seront précisées dans l’étude d’impact, les charges administratives qui seront en contrepartie supprimées, avec la règle suivante : une charge supprimée pour une charge créée.

 

Cette étude d’impact fera l’objet d’une contre-expertise par une autorité administrative indépendante. C’est un système qui a fait ses preuves dans de nombreux pays européens. Cette autorité aurait pour mission de se prononcer publiquement sur la qualité de l’étude d’impact et de préciser si le Parlement dispose ou non des informations nécessaires sur le projet de loi présenté par le gouvernement. Cela en toute transparence et en toute impartialité. Éclairé par cet avis, le Parlement pourrait choisir d’inscrire le projet de loi à l’ordre du jour ou demander au gouvernement de revoir sa copie, comme le lui permet l’article 39 de la Constitution.

 

Enfin, la publicité de l’avis du Conseil d’État sur les projets de lois. Aujourd’hui, ces avis ne sont connus que du seul gouvernement. Pourtant, la publication de ces documents permettrait d’améliorer la qualité de la loi. Les auteurs du rapport soulignent d’ailleurs que dans de nombreux pays, l’avis du Conseil d’État ou de l’institution équivalente, est rendu intégralement public.

 

A lire aussi cet article du Monde.fr et celui de Contexte.com par Samuel Le Goff.

 

 

 

 

Photo de la conférence de presse à l'Assemblée Nationale - 8/10/2014

 

Intervention de Régis Juanico, à la conférence de presse.


Mesdames et Messieurs,

Les membres de la mission de la Conférence des présidents sur la simplification législative, créée à l’initiative du Président Claude Bartolone le 26 novembre 2013, ont adopté hier, à l’unanimité, 15 propositions susceptibles d’améliorer la fabrique de la loi.

I.                 Tout d’abord, en amont de la procédure législative, une première série de propositions vise à améliorer la préparation de la norme, et notamment la qualité de l’évaluation préalable de son impact.

·       La première proposition concerne l’enrichissement du contenu des études d’impact. Si des progrès ont été accomplis en la matière depuis la réforme constitutionnelle de 2008, leurs insuffisances ont été pointées à plusieurs reprises au cours de nos travaux. Il est préconisé :

- de rendre obligatoire, pour les textes législatifs, la réalisation d’un « test entreprises » ainsi que de tests « collectivités locales » et « usagers de l’administration » ;

- d’améliorer l’évaluation des coûts et bénéfices économiques ainsi que des conséquences sociétales des mesures envisagées ;

- de fournir une analyse et une justification approfondies à l’appui des mesures transitoires et des dates d’entrée en vigueur retenues ;

- d’y intégrer, sur le modèle britannique, l’exigence de quantification des charges administratives supprimées en contrepartie et à hauteur des charges administratives créées (« one-in, one-out »), exigence qui est aujourd’hui réservée aux textes réglementaires ;

- d’y introduire, sur le modèle allemand, les critères sur lesquels se fondera l’évaluation ex post de ces mesures.

·       Mieux renseignées, les études d’impact devront également être soumises à une contrexpertise externe et impartiale, à l’instar de la pratique instaurée au Royaume-Uni et en Allemagne, qui se sont respectivement dotés d’un comité de la politique réglementaire (« RPC ») et d’un conseil national de contrôle des normes (« NKR »).

La deuxième proposition suggère ainsi de confier l’évaluation de la qualité des études d’impact à un organisme indépendant :

– composé de représentants de la société civile ;

– chargé, en s’appuyant sur des experts issus des secteurs privé et public, notamment des universités, de l’INSEE, des administrations économiques, des corps d’inspection et des contrôles généraux, de rendre un avis public prenant notamment en compte l’évolution estimée des charges administratives résultant de la mesure envisagée.

Cet avis sur les études d’impact assortissant les projets de loi devrait être rendu public lors de la présentation de ces derniers en conseil des ministres.

·       Plus indépendante, l’évaluation ex ante de la norme devrait aussi être plus systématique. Il serait paradoxal d’appeler de nos vœux un approfondissement des études d’impact assortissant les projets de loi tout en continuant de dispenser d’autres textes législatifs de toute étude d’impact. C’est la raison pour laquelle, en s’inspirant des bonnes pratiques adoptées notamment à l’occasion de l’examen de la proposition de loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence, la troisième proposition vise à rendre obligatoire la réalisation d’une étude d’impact sur les propositions de loi inscrites à l’ordre du jour. Cette étude pourra, le cas échéant, être complétée par un avis du Conseil d’État selon les modalités de saisine actuellement prévues par la Constitution. De son côté, la quatrième proposition suggère de rendre obligatoire la réalisation d’une étude d’impact pour les ordonnances, y compris lorsque celles-ci ne concernent ni les entreprises ni les collectivités territoriales.

·       Enfin, l’évaluation ex ante de la norme gagnerait à être fiabilisée par un recours accru à l’expérimentation. C’est l’objet de la cinquième proposition qui suggère d’en développer l’utilisation avant la généralisation de certains dispositifs législatifs et d’en consolider les effets juridiques, à l’exemple de ce qui a été prévu par l’ordonnance du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’un certificat de projet, prise sur le fondement de la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et à sécuriser la vie des entreprises.

II.                Ensuite,une deuxième série de propositions concerne la procédure législative :

·       La sixième proposition consiste à rendre publique la partie de l’avis du Conseil d’État relative aux études d’impact assortissant les projets de loi, les projets d’ordonnance et, le cas échéant, les propositions de loi.

·       Dès lors qu’il pourra s’appuyer sur la partie de l’avis du Conseil d’État traitant de la qualité des études d’impact jointes aux projets de loi (et, le cas échéant, aux propositions de loi), le débat parlementaire sera mieux à même d’être recentré sur ces études. Idéalement, le renforcement du contrôle du Parlement sur la qualité des études d’impact devrait passer par l’organisation d’un débat d’orientation en séance publique, préalable à l’examen du texte en commission, débat qui aurait vocation à se substituer à la discussion générale, à l’instar de ce qui se pratique en Allemagne, au Danemark, en Espagne et au Royaume-Uni. Un autre moyen de placer les études d’impact au cœur du débat parlementaire pourrait consister à prévoir l’organisation systématique d’un débat en commission sur la qualité de ces études. Ce débat pourrait être impulsé par la création d’une obligation, pour le rapporteur de la commission saisie au fond d’un texte, de présenter, dans son intervention liminaire lors de l’examen en commission, l’étude d’impact jointe au projet de texte. Un débat sur l’étude d’impact pourrait ainsi s’engager avant l’examen des articles et des amendements.

·       Toutefois, la réalisation d’une étude d’impact sérieuse et exhaustive sur un projet ou une proposition de loi ne sera d’aucune utilité tant qu’un amendement gouvernemental ou parlementaire pourra, au cours de la procédure législative, sans faire l’objet de la moindre évaluation, bouleverser l’équilibre du projet ou de la proposition de loi en question. C’est la raison pour laquelle la huitième proposition préconise, en s’inspirant des pratiques des Parlements européen, allemand et néerlandais, de reconnaître au président de la commission saisie au fond le droit d’exiger la réalisation d’une étude d’impact sur les amendements qualifiés par ladite commission de « substantiels ».

·       L’élaboration d’une étude d’impact sur un amendement « substantiel » d’origine gouvernementale ne sera toutefois possible que si un temps minimal d’évaluation est ménagé entre son dépôt et sa discussion. C’est pourquoi la neuvième proposition suggère de soumettre les amendements gouvernementaux à un délai de dépôt, tant lors de l’examen des textes en commission que lors de leur examen en séance publique – étant précisé que ce délai pourrait ne pas être le même que celui qui est aujourd’hui prévu à titre de principe pour les amendements parlementaires. Cette proposition va dans le sens d’un renforcement des droits du Parlement.

·       Une meilleure gestion du temps parlementaire : c’est aussi l’objet de la dixième proposition qui, sans remettre en cause le recours « de droit » à la procédure accélérée pour les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale ainsi que pour les projets de loi relatifs aux états de crise, suggère d’aménager les règles relatives à cette procédure d’urgence pour préserver un temps minimal d’examen parlementaire entre le dépôt d’un texte et sa discussion devant chaque assemblée, sur le modèle de ce qui est aujourd’hui prévu pour les seules lois organiques.

·       Une nouvelle répartition du temps parlementaire, c’est encore l’objet de la onzième proposition qui, dans un souci d’efficience, vise à repenser l’organisation des débats budgétaires de façon à faire de la loi de règlement un moment fort d’évaluation, notamment de la modernisation de l’action publique, comme nous l’avions déjà proposé dans un premier rapport au Président Claude Bartolone avec mon collègue François Cornut-Gentille.

·       La réflexion menée par la mission sur la gestion du temps parlementaire s’est étendue au temps que nos assemblées consacrent à l’examen de textes législatifs pris pour la transposition de directives européennes, et donc à la méthode jusqu’ici retenue en la matière. S’inspirant de la méthode allemande de transposition (dite « de la double corbeille »), la douzième proposition suggère de privilégier la transposition des directives européennes par voie d’ordonnances selon une procédure organisée en deux temps : le premier passerait par l’élaboration d’un projet d’ordonnance assorti d’une étude d’impact complète et précise, identifiant et justifiant les éventuelles « surtranspositions » ; le second consisterait en un débat parlementaire, à l’occasion du projet de loi de ratification, sur l’étude d’impact jointe à l’ordonnance et sur la partie de l’avis du Conseil d’État relative à cette étude d’impact.

III.          Enfin, une troisième série de propositions a trait à l’amélioration de l’évaluation de la norme en aval de son adoption :

·                  La clarification du paysage de l’évaluation des politiques publiques est apparue comme un préalable à l’amélioration de l’évaluation ex post. En effet, la mission a pu constater que notre pays comptait de nombreux acteurs à l’origine de multiples initiatives qui, dans un souci d’efficacité, gagneraient sans doute à être mieux coordonnées et organisées de façon plus méthodique, afin d’éviter les doublons. Cour des comptes, comité d’évaluation et de contrôle (CEC), mission d’évaluation et de contrôle (MEC), commission pour le contrôle de l’application des lois, corps d’inspection, directions ministérielles de la recherche, des études, de l’évaluation, de la prospective et des statistiques… Il est aujourd’hui extrêmement difficile de faire un recensement exhaustif des institutions, organes parlementaires ou services ministériels qui interviennent en matière d’évaluation ex post des normes, et, plus largement, des politiques publiques, tant ceux-ci sont nombreux. Autant gagner du temps et économiser des moyens en organisant une conférence des évaluateurs pour mieux coordonner les initiatives en matière d’évaluation ex post aujourd’hui prises par les divers organes du Parlement, de l’exécutif et par des institutions comme la Cour des comptes ou le Conseil économique, social et environnemental.

·       Mieux coordonnée, l’évaluation ex post de la norme gagnerait aussi à être plus méthodique. La proposition faite par la mission d’enrichir le contenu des études d’impact ex ante de façon à ce qu’elles identifient mieux les indicateurs précis sur le fondement desquels se fondera l’évaluation ex post est susceptible d’y contribuer, au même titre que la quatorzième proposition, qui appelle à développer l’insertion, dans certains types de loi, de clauses de révision amenant le Parlement à débattre de l’efficacité du dispositif adopté dans un certain délai après son entrée en vigueur, sur le modèle des pratiques adoptées, là encore, par nos voisins britanniques et allemands.

Le renforcement du contrôle parlementaire sur l’application de la loi pourrait aussi passer par la mise en place d’une pratique tendant à contraindre le Gouvernement à justifier devant les commissions parlementaires compétentes l’absence de publication des décrets d’application à l’expiration d’un certain délai (entre six mois et un an) courant  à compter de la promulgation de la loi.

·       Ce contrôle plus étroit de la parution des décrets d’application devrait en outre s’accompagner de l’élaboration de rapports d’évaluation qui, confiés à un binôme de rapporteurs majorité-opposition, analyseraient ex post l’impact d’une loi, trois ans après son entrée en vigueur, et qui s’inscriraient dans un programme d’évaluation mieux ordonné. C’est l’objet de la quinzième et dernière proposition qui suggère qu’indépendamment des réexamens exigés par des clauses de révision, soient prévus des rendez-vous triennaux d’évaluation de lois adoptées et qu’en conséquence un programme annuel voire pluriannuel d’évaluation soit défini dans les deux assemblées parlementaires, en répartissant entre ces dernières les thématiques abordées.

Je n’ignore pas que ces 15 propositions sont ambitieuses et que certaines d’entre elles nécessitent une révision constitutionnelle. Toutefois, elles sont à la hauteur des enjeux. 8000 lois en vigueur, 400 000 normes, près de 80 000 pages de circulaires : l’inflation normative a atteint dans notre pays un niveau tel qu’elle menace la démocratie. Il faut donc mettre fin au décalage que l’on constate trop souvent, dès lors que l’on parle d’inflation normative, entre les intentions et les réalisations, entre les constats et les pratiques. C’est tout l’objet de ces 15 propositions pour mieux légiférer et mieux évaluer, dont j’ai la conviction qu’elles ne resteront pas lettre morte.

1 Commentaire

Plastic28
15/11/2014 19:57

Bonjour Madame la Députée
Les charges administratives sont supprimées..... et contrôlées par l'Autorité Administrative. Je ne comprends pas.
L'Autorité Administrative n'est-elle pas juge et parti dans ce cas?
éclairez-nous !
Cordialement.
plastic28

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